Suite à la sortie polémique récente de Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, le journaliste indépendant Théophile Kouamouo, à travers un post sur Facebook, condamne les propos du sphinx de Daoudro.
« S’il faut parler de l’orpaillage clandestin en Côte d’Ivoire, il faut en parler de manière rigoureuse et précise. Il faut mettre très clairement en cause les patrons de ces filières, et non pointer du doigt leurs exécutants qui sont au final de pauvres hères.
En effet, le 6 avril 2011, alors que la bataille d’Abidjan battait son plein, Le Canard Enchaîné indiquait que l’or issu des mines artisanales avait financé l’effort de guerre du camp Ouattara. Sous ma plume, Le Nouveau Courrier résumait alors ces révélations : « Des proches de Ouattara ont monnayé, en 2009 et 2010, d’importantes quantités d’or extraites des mines du Nord. Plusieurs tonnes ont été acheminées au Ghana voisin sous couvert de véhicules de… l’ONU. Puis envoyées, par petites quantités, à Anvers (Belgique) pour y être transformées. A l’état de poudre, cet or a été négocié à plus de 15 000 euros le kilo. » Bédié s’en est-il offusqué ? Nada.
En 2015, une enquête de France Inter évoquait une filière d’orpaillage clandestine en Côte d’Ivoire. Expliquait bien que les orpailleurs burkinabé et les propriétaires terriens ivoiriens ne touchaient qu’une petite partie des bénéfices de cette exploitation. Suivant la trace des gros sous, cette enquête pointait du doigt l’ex comzone Wattao et « des personnages en vue du gouvernement ivoirien actuel, ou de l’ancien gouvernement burkinabé ». Elle s’inspirait notamment d’un document interne de l’ONU (https://www.franceinter.fr/emissions/l-interview/l-interview-04-decembre-2015). Les ministres du PDCI étaient au gouvernement. Bédié était le PCA de la Côte d’Ivoire.
Aujourd’hui, sans pointer clairement du doigt les bénéficiaires locaux et internationaux de cette exploitation aurifère, Bédié cible la piétaille prolétaire de cette vaste entreprise de dépossession. Une piétaille exposée au mercure et au cyanure, qui mourra de cancers divers tandis que les comptes des commanditaires se rempliront dans les paradis fiscaux.
Mais en réalité, quand on prend les choses dans leur complexité, on comprend pourquoi il est urgent pour lui de poser la question en termes identitaires. Il compte bien soulever les émotions binaires et faire oublier son insertion dans le système de prédation dont les orpailleurs clandestins sont la face visible.
La diversion nationaliste apparaît là encore comme l’arme de la bourgeoisie locale qui ne veut pas rendre de comptes, qui ne veut pas s’engager à changer quoi que ce soit, qui ne veut pas dénoncer le sommet de la pyramide prédatrice, qui ne veut même pas demander pardon pour tout ce à quoi elle a exposé le peuple ivoirien » Théophile Kouamouo