Le land grabbing ou accaparement des terres et expropriation forcée des terres en Côte d’Ivoire, pourrait être appelé la nouvelle forme de colonialisme. En fait, le colonialisme a permis à la mère patrie d’exploiter ses biens sur le continent africain d’un point de vue agricole, obligeant les différents territoires à des cultures spécifiques, telles que la monoculture du cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana. Aujourd’hui, le gouvernement ivoirien fait quelque chose de très similaire en s’accaparant des terres déjà légalement retrocédées pour les vendre: Cas de « l’Affaire du foncier Djibo Koman » à Bassam.
Les puissances économiques émergentes, en particulier les Asiatiques et les Arabes, achètent ou dans certains cas louent pendant de nombreuses années (99 ans) d’immenses territoires et les consacrent exclusivement à des productions agricoles destinées à l’importation dans leurs pays. Bien sûr, tout cela se fait, très souvent, avec la complicité d’acteurs locaux qui préfèrent vendre d’immenses territoires, enrichir leurs poches, plutôt que de mettre en place une politique agricole visant à l’autosuffisance.
Un activiste masai bien connu, Edward Loure vainqueur du Goldman environmental prize en 2016 pour l’Afrique, explique comment le problème de tels investissements pourraient favoriser les emplois et les exportations, mais cela n’arrive presque jamais.
En Côte d’Ivoire, par exemple, un accord a été signé en 2013 avec la multinationale Français Louis Dreyfus pour l’octroi de 100 000 hectares de terrain. Le gouvernement ivoirien a présenté cet accord comme une campagne de recherche d’investissement, mais pour les petits agriculteurs locaux ce n’était pas le cas. En effet, à cette occasion, selon une analyse de l’audace institut Afrique (AIA), les agriculteurs des régions de Poro, Bagoué et Tchologo n’ont en aucun cas participé aux négociations concernant leurs terres. Ils ont simplement vu léguer une partie de leurs terres qu’ils cultivaient à un groupe de Louis Dreyfus qui gère déjà 60% des exportations de riz. De même, le mercredi 17 juin 2020 des propriétaires terriens de Grand-Bassam se sont rendu au ministère de tutelle pour dénoncer l’expropriation de plus de quatre milles cinq cents lots.
Le problème dans ces cas est que les paysans qui cultivent ces terres depuis des années ne possèdent pas de titres de propriété, la plupart du temps, et donc l’État peut accorder ces terres, distribuant les droits d’exploitation aux grandes multinationales étrangères, perpétuant le système de l’ère coloniale.
Très souvent, de telles concessions ne créent pas d’emplois pour les populations locales, qui ne sont en fait considérées que comme de la main-d’œuvre bon marché sans droits, et dans certains cas, comme la Chine, elles exposent ses agriculteurs.
Entre autres, dans l’analyse de l’accaparement des terres (Le land grabbing), un fait important est ce qu’on appelle le catch control, c’est-à-dire le contrôle de vastes territoires et d’autres ressources naturelles qui leur sont liées, comme l’eau.
En plus, aujourd’hui, nous assistons à une nouvelle forme de land grabbing des hommes d’état, des escroqueries vis à vis des ivoiriens de la diaspora qui veulent investir en Côte d’Ivoire.
En février de cette année à Abidjan, les évêques du Comité permanent de l’Union des conférences épiscopales d’Afrique de l’Ouest, lus sur le site de l’agence fides, ont déclaré dans une déclaration publique : « Nous dénonçons fermement l’accaparement des terres et l’expropriation forcée des terres sous toutes ses formes. Les conséquences sont incalculables : perte du patrimoine culturel et ancestral, déplacement, chômage, famine, exode, migration, etc. S’adressant directement aux États et aux multinationales, qui continuent l’accaparement des terres, cette honteuse expropriation forcée des terres en Afrique.
Nous avons besoin d’un système juridique solide qui crée des lois qui empêchent cette expropriation, et là où les lois existent déjà, un système juridique solide qui les applique.
Bouba Kary